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PARALOGISMES DE LA RAISON PURE


missibles par rapport à des objets d’expérience possible et comme principes de la possibilité de cette expérience, mais elles pourraient aussi s’appliquer aux choses envisagées en général et en elles-mêmes. Cette conséquence porterait un coup mortel à toute notre critique et nous forcerait à revenir à l’ancienne méthode. Mais en regardant la chose de plus près, on voit que le danger n’est pas si grand.

Il y a un paralogisme qui domine les procédés de la psychologie rationnelle : il est représenté par le syllogisme suivant :

Ce qui ne peut être conçu autrement que comme sujet n’existe aussi que comme sujet et par conséquent est une substance :

Or un être pensant, considéré simplement comme tel, ne peut être conçu que comme sujet :

Donc il n’existe aussi que comme sujet, c’est-à-dire comme substance.

Dans la majeure il est question d’un être qui peut être conçu sous tous les rapports en général et aussi par conséquent comme il peut être donné dans l’intuition. Mais dans la mineure il n’est plus question du même être qu’autant qu’il se considère lui-même comme sujet uniquement par rapport à la pensée et à l’unité de la conscience, mais non pas en même temps par rapport à l’intuition, qui donnerait cette unité comme objet à la pensée. La conclusion est donc tirée per sophisma figuræ dictionis, c’est-à-dire par un raisonnement captieux *[1].

  1. * La pensée est prise dans les deux prémisses en des sens entièrement différents : dans la majeure, elle s’applique à un objet en général (tel par conséquent, qu’il peut être donné dans l’intuition) ; dans la mineure au contraire, on ne l’envisage que dans son rapport à la cons-