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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


principes empiriques. En effet, dans ce dernier cas, elle n’arriverait qu’après les systèmes, tandis qu’au contraire c’est elle qui a produit ce qu’il y a de systématique dans la connaissance de la nature. Il ne faudrait pas voir derrière ces lois le dessein caché d’en faire l’épreuve à titre de simple essai, bien que sans doute, quand cet enchaînement se rencontre, il fournisse un puissant motif de tenir pour fondée l’unité hypothétiquement conçue, et que par conséquent ces lois aient aussi sous ce rapport leur utilité ; mais il est clair qu’elles jugent rationnelles en soi et conformes à la nature l’économie des causes premières, la diversité des effets et, comme conséquence, l’affinité des membres de la nature, et qu’ainsi ces principes se recommandent directement et non pas simplement comme des procédés de la méthode.

Mais on voit aisément que cette continuité des formes est une simple idée à laquelle on ne saurait indiquer dans l’expérience un objet correspondant. C’est qu’en effet les espèces dans la nature, étant réellement divisées, doivent former en soi un quantum discretum, et que, si le progrès graduel dans l’affinité des espèces était continu, il y aurait aussi une véritable infinité de membres intermédiaires entre deux espèces données, ce qui est impossible. En outre nous ne pouvions faire de cette loi aucun usage empirique déterminé, attendu qu’elle ne nous indique pas le moindre critérium d’affinité d’après lequel nous puissions chercher, jusqu’à une certaine limite, la série graduelle de la diversité, mais qu’elle ne nous offre que cette indication générale d’avoir à la chercher.

Si nous transvertissions l’ordre des principes que nous venons de citer, de manière à les disposer conformément