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CRITIQUE DE TOUTE THÉOLOGIE SPÉCULATIVE


chose est ; et l’usage pratique, celui qui me fait connaître à priori ce qui doit être. Or, s’il est indubitablement certain que quelque chose est, ou doit être, mais si cela n’est cependant que conditionnel, alors ou bien une certaine condition déterminée peut être admise à cet effet comme absolument nécessaire, ou bien elle peut être simplement supposée comme arbitraire et accidentelle. Dans le premier cas, la condition est postulée (per thesin) ; dans le second, elle est supposée (per hypothesin). Comme il y a des lois pratiques qui sont absolument nécessaires (les lois morales), si ces lois supposent nécessairement quelque existence comme condition de la possibilité de leur force obligatoire, cette existence doit être postulée, puisque le conditionnel d’où part le raisonnement pour s’élever à cette condition déterminée est lui-même connu à priori comme absolument nécessaire. Nous montrerons plus tard que les lois morales ne supposent pas seulement l’existence d’un être suprême, mais que, comme elles sont absolument nécessaires sous un autre rapport, elles la postulent à juste titre, mais seulement à la vérité au point de vue pratique ; pour le moment nous laisserons de côté cette espèce de raisonnement.

Puisque, quand il s’agit de ce qui est (non de ce qui doit être), le conditionnel qui nous est donné dans l’expérience est toujours conçu connue contingent, la condition qui lui est propre ne peut être connue par là comme absolument nécessaire ; elle ne sert que comme une supposition relativement nécessaire, ou plutôt comme une supposition indispensable pour la connaissance rationnelle du conditionnel, mais qui en soi et à priori est arbitraire. Si donc la nécessité absolue d’une chose doit être connue dans la connaissance théorétique, cela ne pourrait