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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


de l’autre doivent être admises, je veux dire la nature et la liberté. Elle s’élève donc de ce monde à l’intelligence suprême comme au principe de tout ordre et de toute perfection, soit dans le règne de la nature, soit dans le règne moral. Dans le premier cas, elle s’appelle théologie physique ; dans le second, théologie morale *[1].

Comme on est accoutumé d’entendre, sous le concept de Dieu, non pas simplement une nature éternelle agissant aveuglément et formant la racine des choses, mais un être suprême qui doit être l’auteur des choses par son intelligence et sa liberté ; et que ce dernier concept est d’ailleurs le seul qui nous intéresse, on pourrait à la rigueur, refuser au déiste toute croyance en Dieu et ne lui laisser que l’affirmation d’un être premier ou d’une cause suprême. Cependant, comme personne ne doit être accusé de vouloir nier une chose : parce qu’il n’ose l’affirmer, il est plus équitable et plus juste de dire que le déiste croit en un Dieu, mais que le théiste croit en un Dieu vivant (summa intelligentia). Recherchons maintenant les sources possibles de toutes ces tentatives de la raison.

Je me contenterai ici de définir la connaissance théorétique une connaissance par laquelle je connais ce qui est, et la connaissance pratique une connaissance par laquelle je me représente ce qui doit être. D’après ces définitions l’usage théorétique de la raison est celui par lequel je connais à priori (comme nécessaire) que quelque

  1. * Je ne dis pas morale théologique. Celle-ci en effet contient des lois morales qui présupposent l’existence d’un souverain maître du monde tandis que la théologie morale fonde sur des lois morales la croyance à l’existence d’un être suprême.