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DE L'IDÉAL TRANSCENDENTAL


quel elles sont produites d’une manière parallèle et correspondante aux trois espèces de raisonnements.

Il est évident de soi que, pour atteindre ce but, c’est-à-dire pour se représenter simplement la détermination nécessaire et complète des choses, la raison ne présuppose pas l’existence d’un être conforme à l’idéal, mais seulement l’idée de cet être, et qu’elle n’a besoin que de cette idée pour dériver d’une totalité inconditionnelle de la détermination complète la détermination conditionnelle, c’est-à-dire la détermination du limité. L’idéal est donc pour elle le prototype (prototypon) de toutes les choses, qui, comme des copies défectueuses (ectypa), en tirent la matière de leur possibilité, et qui, en s’en rapprochant plus ou moins, en restent toujours infiniment éloignées.

Toute possibilité des choses (de la synthèse de leurs éléments divers quant à leur contenu) est donc considérée comme dérivée, et seule celle de ce qui renferme en soi toute réalité est regardée comme originaire. En effet toutes les négations (qui sont pourtant les seuls prédicats par lesquels tout ce qui n’est pas l’être réel par excellence se distingue de lui), sont de simples limitations d’une réalité supérieure et enfin de la plus haute réalité, et par conséquent elles la présupposent et en dérivent quant à leur contenu. Toutes les choses diverses ne sont donc que des manières également diverses de limiter le concept de la suprême réalité, qui est leur substratum commun, de même que toutes les figures ne sont que des manières diverses de limiter l’espace infini. C’est pourquoi leur objet idéal, qui ne réside que dans la raison, s’appelle aussi l’être originaire (ens originarium) ; en tant qu’il n’y en a aucun au-dessus de lui, l’être suprême (ens summum) ; et, en tant que tout lui est subordonné comme condi-