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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE




Remarque finale sur toute l’antinomie de la raison pure


Tant que nos concepts rationnels n’ont pour objet que la totalité des conditions du monde sensible et ce qui peut par rapport à ce monde tourner au profit de la raison, nos idées sont à la vérité transcendentales, mais cosmologiques. Mais, dès que nous plaçons l’absolu (dont pourtant il s’agit proprement) dans ce qui est tout à fait en dehors du monde sensible, par conséquent en dehors de toute expérience possible, les idées deviennent alors transcendantes ; elles ne servent pas seulement à l’accomplissement de l’usage empirique de la raison (usage qui reste toujours une idée qu’on ne saurait jamais réalise mais qu’il faut toujours poursuivre), mais elles s’en séparent entièrement, et se transforment en objets dont la matière n’est point tirée de l’expérience, et dont la réalité objective ne repose pas non plus sur l’accomplissement de la série empirique, mais sur des concepts purs à priori. Ces sortes d’idées transcendantes ont un objet purement intelligible, qu’il est sans doute permis d’accorder comme un objet transcendental, tout à fait inconnu d’ailleurs, mais que nous n’avons aucune raison ni aucun droit d’admettre, en le concevant comme une chose déterminable par ses prédicats distinctifs et essentiels, et qui par conséquent n’est qu’un être de raison. Pourtant, parmi toutes les idées cosmologiques, celle qui a occasionné la quatrième antinomie, nous pousse à risquer ce pas. En effet l’existence des phénomènes, qui n’est nullement fondée en soi-même, mais qui est toujours condition-