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SOLUTION DU QUATRIÈME PROBLÈME


a une existence empiriquement conditionnelle, et qu’il n’y a nulle part en lui, par rapport à aucune propriété, une nécessité inconditionnelle, qu’il n’existe aucun membre de la série des conditions dont on ne doive toujours attendre et, aussi loin qu’on le peut, chercher la condition empirique dans une expérience possible, et que rien ne nous autorise à dériver une existence quelconque d’une condition placée en dehors de la série empirique, ou à la tenir dans la série même pour absolument indépendante et subsistant par elle-même, mais sans nier pour cela que toute la série puisse avoir son fondement dans quelque être intelligible (qui soit ainsi libre de toute condition empirique et contienne au contraire le principe de la possibilité de tous les phénomènes).

On ne songe nullement en cela à démontrer l’existence absolument nécessaire d’un être, ni même à fonder la possibilité d’une condition purement intelligible de l’existence des phénomènes du monde sensible, mais seulement, tout en limitant la raison de telle sorte qu’elle ne perde pas le fil des conditions empiriques et qu’elle ne s’égare pas en des principes d’explication transcendants et qui ne seraient susceptibles d’aucune représentation in concreto, à restreindre aussi, d’un autre côté, la loi de l’usage purement empirique de l’entendement, de manière à l’empêcher de décider de la possibilité des choses en général et de tenir l’intelligible pour impossible, bien qu’il n’y ait pas lieu de s’en servir pour l’explication des phénomènes. Tout ce que l’on veut montrer par là, c’est donc que la contingence universelle de toutes les choses de la nature et de toutes leurs conditions (empiriques) peut très-bien s’accorder avec la supposition arbitraire d’une condition nécessaire, quoique purement intelligible, que par consé-