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DE L’UNION DE LA LIBERTÉ AVEC LA NÉCESSITÉ


avec certitude et dont nous ne pussions reconnaître la nécessité par ses conditions antérieures. Au point de vue de ce caractère empirique, il n’y a donc point de liberté, et ce n’est cependant qu’à ce point de vue que nous pouvons considérer l’homme, quand nous voulons l’observer simplement et scruter physiologiquement, comme cela se pratique dans l’anthropologie, les causes déterminantes de ses actions.

Mais, si nous examinons ces mêmes actions au point de vue de la raison, non pas il est vrai de la raison spéculative, pour en expliquer l’origine, mais de la raison en tant qu’elle est une cause capable de les produire, en un mot si nous les rapprochons de la raison au point de vue pratique, nous trouvons une tout autre règle et un tout autre ordre que celui de la nature. Car alors peut-être tout ce qui est arrivé suivant le cours de la nature, et ce qui était infaillible d’après ses causes empiriques, ne devait-il pas arriver. Or nous trouvons parfois, ou du moins nous croyons trouver que les idées de la raison ont réellement prouvé leur causalité par rapport aux actions de l’homme, considérées comme phénomènes, et qu’elles sont arrivées parce qu’elles étaient déterminées, non par des causes empiriques, mais par des principes de la raison.

Supposez donc que l’on puisse dire que la raison a de la causalité par rapport au phénomène ; son action pourrait-elle être appelée libre, dès qu’elle est très-exactement déterminée et nécessaire dans son caractère empirique (dans la façon de sentir 1[1]) ? Celui-ci est à son tour déterminé dans le caractère intelligible (la façon de

  1. 1 Sinnesart.