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DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


avoir de la causalité ; car autrement elle n’attendrait de ses idées aucun effet dans l’expérience.

Or tenons-nous en là, et admettons au moins comme possible que la raison ait réellement de la causalité par rapport aux phénomènes : il faut, à quelque haut degré qu’elle soit raison, qu’elle montre un caractère empirique, puisque toute cause suppose une règle d’après laquelle certains phénomènes suivent comme effets, et que toute règle exige une uniformité d’effets qui fonde le concept de la cause (comme d’une faculté). Ce rapport, en tant qu’il ressort de simples phénomènes, forme ce que nous pouvons appeler le caractère empirique. Cette faculté et ce caractère sont constants, tandis que les effets, suivant la diversité des conditions qui les accompagnent ou les limitent en partie, apparaissent sous des figures changeantes.

Tout homme a donc un caractère empirique de sa volonté, lequel n’est autre chose qu’une certaine causalité de sa raison, en tant que celle-ci montre dans ses effets phénoménaux 1[1] une règle d’après laquelle on peut inférer la nature et le degré des motifs et des actes de la raison, et juger les principes subjectifs de sa volonté. Puisque ce caractère empirique doit être lui-même, comme effet, tiré des phénomènes et de leur règle, que fournit l’expérience, toutes les actions de l’homme dans le phénomène sont déterminées, suivant l’ordre de la nature, par son caractère empirique et par les autres causes concomitantes ; et, si nous pouvions pénétrer jusqu’au fond tous les phénomènes de sa volonté, il n’y aurait pas une seule action humaine que nous ne pussions prédire

  1. 1 An ihren Wirkungen in der Erscheinung.