Page:Kant - Critique de la raison pure, II.djvu/157

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
144
DIALECTIQUE TRANSCENDENTALE


causes dans la série du temps. Il ne faut pas attendre de la liaison causale des phénomènes une action primitive, par laquelle arrive quelque chose qui n’était pas auparavant.

Mais est-il donc aussi nécessaire que, si les effets sont des phénomènes, la causalité de leur cause, laquelle cause est elle-même un phénomène, soit simplement empirique ? Ou plutôt n’est-il pas possible que, quoique chaque effet dans le phénomène veuille absolument être enchaîné à sa cause suivant les lois de la causalité empirique, cette causalité empirique elle-même, sans rompre le moins du monde son union avec les causes naturelles, soit cependant l’effet d’une causalité non empirique, mais intelligible, c’est-à-dire de l’action originaire, par rapport aux phénomènes, d’une cause qui à ce titre n’est pas un phénomène, mais est intelligible quant à cette faculté, bien que, du reste, elle doive être rattachée au monde sensible, comme anneau de la chaîne de la nature.

Nous avons besoin du principe de la causalité des phénomènes entre eux pour pouvoir chercher et fournir aux événements naturels des conditions naturelles, c’est-à-dire des causes phénoménales. Si ce point est accordé et n’est altéré par aucune exception, l’entendement, qui dans son usage empirique ne voit rien que la nature, en quoi il est d’ailleurs parfaitement fondé, a tout ce qu’il peut exiger, et les explications physiques poursuivent leur cours sans interruption. Or ce n’est pas lui faire le moindre tort que d’admettre, ne fît-on en cela qu’une simple fiction, que parmi les causes naturelles il en est aussi qui ont une faculté purement intelligible, en ce sens que ce qui détermine cette faculté à l’action ne repose jamais sur des conditions empiriques, mais sur de