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cours : le rapport demeure, bien qu’il n’y ait pas eu de temps écoulé. Le temps entre la causalité de la cause et son effet immédiat peut s’évanouir (et par conséquent la cause et l’effet être simultanés), mais le rapport de l’un à l’autre reste toujours déterminable dans le temps. Si, par exemple, une boule est placée sur un moelleux coussin et y imprime une légère dépression, cette boule, considérée comme cause, est en même temps que son effet. Mais je les distingue cependant tous deux par le rapport de temps qu’implique leur liaison dynamique. En effet, quand je place la boule sur le coussin, la dépression de ce coussin succède à la forme unie qu’il avait auparavant ; mais si le coussin a déjà reçu (n’importe comment) une dépression, il n’en est plus de même[ndt 1].

La succession est donc en tout cas l’unique critérium empirique de l’effet dans son rapport avec la causalité de la cause qui précède. Le verre est la cause de l’élévation de l’eau au-dessus de sa surface horizontale, bien que les deux phénomènes soient en même temps. En effet, dès que je puise de l’eau avec un verre dans un plus grand vase, quelque chose suit, à savoir le changement de la figure horizontale qu’elle avait dans ce vase en une figure concave qu’elle prend dans le verre.

Cette causalité conduit au concept de l’action, celle-ci au concept de la force et par là à celui de la substance. Comme je ne veux pas mêler à mon entreprise critique,

  1. Kant veut dire (l’expression de sa pensée est si peu claire ici qu’elle a besoin d’explication) que le changement qui s’opère dans la forme du coussin peut seul nous servir à reconnaître un rapport de cause à effet entre la boule et la dépression de ce coussin, et qu’ainsi ce rapport ne se manifeste à nous qu’au moyen d’une succession d’états divers. Telle est, en effet, la conclusion à laquelle il arrive dans l’alinéa suivant. J. B.