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CRITIQUE DE LA RAISON PURE


cela, je me borne à étudier la raison même et ses pensées pures ; pour en acquérir une connaissance étendue, je n’ai pas besoin de chercher bien loin autour de moi, car je la trouve en moi-même, et l’exemple de la logique ordinaire me prouve qu’il est possible de faire un dénombrement complet et systématique de ses actes simples. Toute la question ici est de savoir jusqu’où je puis espérer d’arriver avec la raison, alors que toute matière et tout concours de l’expérience m’est enlevé.

En voilà assez sur la perfection[ndt 1] à chercher dans la poursuite de chacune des fins que nous propose, non un dessein arbitraire, mais la nature même de la connaissance, et sur l’étendue[ndt 2] à donner à celle de toutes ces fins ensemble, c’est-à-dire sur la matière de notre entreprise critique.

Au point de vue de la forme, il y a aussi deux qualités que l’on est en droit d’imposer comme conditions essentielles à tout auteur qui tente une entreprise si difficile ; je veux parler de la certitude et de la clarté.

Pour ce qui est de la certitude, voici la loi que je me suis imposée à moi-même : dans cet ordre de considérations, l’opinion[ndt 3] est absolument proscrite, et tout ce qui ressemble à une hypothèse est une marchandise prohibée qui ne doit être mise en vente à aucun prix, mais qu’on doit saisir dès qu’on la découvre. En effet, toute connaissance qui a un fondement à priori est marquée de ce caractère, qu’elle veut être tenue pour absolument nécessaire ; à plus forte raison en doit-il être ainsi d’une détermination de toutes les connaissances pures à priori qui doit servir elle-même de mesure et d’exemple à toute

  1. Vollständigkeit.
  2. Ausführlichkeit.
  3. Meinen.