Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rizon d’une petite boutique de marchands de vins, où je trouvais Verlaine uniment placé devant un verre ; il m’en offrit la rime, car sa plaisanterie était demeurée banvillesque. Il voulut bien me dire, en exagérant amicalement, qu’il connaissait ma jeune réputation, et à ma demande de copie, il répondit par des phrases modestes ; pourtant il constata que c’était là une consécration, et que c’était la récompense de la vie, au début d’une vieillesse infirme, de s’entendre dire par des jeunes hommes qu’on avait bien fait, et qu’on pouvait être revendiqué par eux, en tant qu’exemple quoi qu’indigne, et presque traité de dieu, comme un ancêtre. Je voulus lui spécifier ce que j’attendais de lui, c’était une suite à ses Poëtes maudits que je savais en train. Verlaine, d’abord, rompit les chiens, biaisa, me parla de Mallarmé dont il me savait le fidèle, me récita des vers de Mallarmé avec de curieuses intonations, grandiloquentes, et nous esthétisâmes pour le plaisir d’esthétiser, et de se trouver des points communs. Il me raconta son retour à Paris, et puis ses chagrins, une partie au moins ; là dessus un petit bonhomme, un gosse passait, fin et svelte, grêle même. Verlaine l’appela, lui donna un sou pour en user avec magnificence, me dit : j’en ai fait un Pierrot, et récita une courte pièce fort jolie ; craignant d’avoir paru trop homme de lettres, et soucieux d’offrir la réciprocité, comme excuse, il s’informa de mes derniers vers, mais je le ramenais à notre sujet qui était lui, et ce qu’il voudrait bien donner à La Vogue. Verlaine me parla de son portrait de Desbordes Valmore, et alla quérir non point son article, mais les œuvres de Desbordes Val-