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symbolistes et décadents

de M. Gaston Boissier, qui n’est d’ailleurs en cette occasion que le porte-parole des poètes et des critiques académiciens — « ce que l’Académie refuse à un système dont il (M. Gregh) n’est pas le créateur et que quelques-uns de ses amis ont déconsidéré par leurs exagérations ». On aimerait être fixé. Qui vise-t-on ici. Si l’on avait affaire en M. Boissier et ses amis, à des gens bien informés, il faudrait croire qu’un ami de M. Gregh, un jeune homme comme lui de vingt-cinq ans, a coupablement distendu et exagéré la rythmique du vers libre. Mais ce ne doit pas être cela. Je penserai plutôt que l’Académie adresse habilement une tendresse à des poètes qui ne sont pas entrés franchement dans la voie du vers libre, et ne sont pas non plus restés absolument fidèles à l’ancienne technique. M. Henri de Régnier représente notamment ce compromis. Et alors, dans ce sens, ce seraient les vrais vers libristes qui seraient accusés d’aller trop loin. L’Académie, toujours fine, et instruite, au lieu de savoir qu’il y a eu réforme, et qu’ensuite certains esprits ont jugé sage de choisir dans cette réforme les éléments qui leur convenaient, et de les juxtaposer à leurs connaissances traditionnelles, s’imagine qu’on a commencé par de timides efforts pour se déganguer et qu’ensuite certains, moi peut-être, ont été excessifs, vraiment excessifs. Non, Monsieur Boissier, le vers libre est allé tout d’un coup, lors de sa création, jusqu’au bout de ses nécessaires audaces, et s’il y a eu des assagissements et des arrangements, cela est postérieur.

L’histoire de cette question est, je crois, connue à l’Académie, au rebours ; ce n’est pas la seule question