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symbolistes et décadents

que c’est moi ; c’est donc à moi que s’adressait M. Boissier, c’est à moi de lui répondre ; et voici :

Personnellement, quoique jugeant que l’argent légué à l’Académie pour aider ou récompenser les efforts d’art est assez mal distribué, je n’en ai jamais demandé et n’en demanderai jamais. Pourquoi ? Parce qu’il me faudrait le demander et par cela même me soumettre à la juridiction de l’Académie. Je m’y refuse et n’envoie aucun livre à l’Académie. Pourquoi ? 1o Parce que la compagnie de médiocres, de toujours médiocres (en très grande majorité), qui n’a reconnu ni Balzac, ni Nerval, ni Gautier, ni Baudelaire, n’a pas qualité pour juger les novateurs ni en leur esprit ni en leur langue. 2o Parce que l’Académie actuelle en son assemblage de lettrés aimables, de vaudevillistes à tout faire, de poètes parnassiens (il en manque et les meilleurs), d’historiens spécialistes et de critiques étroits, ne peut pas comprendre une théorie nouvelle. Eussent-ils isolément de l’esprit et du jugement, ils le perdent étant réunis. 3o Parce que l’Académie, en cette occasion écoutant la voix de ses poètes naturellement conservateurs, et de ses critiques naturellement conservateurs, n’apporte en ces questions aucune impartialité, et que ses moyens d’action, ses prix, sont utilisés comme moyens de combat, au service de ce qu’ils appellent la bonne cause, sans voir assez l’interprétation défavorable qu’on peut avoir de leur conduite ; car l’admiration qu’on peut avoir pour eux est intimement dépendante de la conservation du vieux système.

Or, contre le flot montant des théories et surtout