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premiers drames d’Hugo ; un gai et laborieux manœuvre, Alexandre Dumas, en monnaiera la bonne nouvelle. Vigny ajoutera quelques pages solides à l’histoire de ce théâtre romantique, mais sa belle œuvre est ce poème, tout à fait réalisé : Moïse, rivalisant avec les plus belles Méditations et les Feuilles d’Automne. Voici avec Cromwel et Hernani le bilan de deuxième période romantique, la première ayant été surtout illustrée par Chateaubriand. Le romantisme allemand a eu la fortune de s’appuyer tout de suite sur le jaillissement de la poésie populaire, d’où, chez lui, un pittoresque plus sûr, mais moins éclatant et moins varié. Le romantisme allemand va vers l’intimité, le romantisme français emprunte davantage à la rhétorique et à l’éloquence. Des deux côtés, l’influence toute puissante de Racine a vécu.

La troisième période romantique entoure Hugo et Lamartine d’une foule de disciples ; et Musset crée une alliance du vers français nouveau avec d’anciens genres du xviiie siècle comme le Conte. Les premiers romantiques n’ont vu qu’Hamlet et Othello, Musset découvre Peines d’amour perdues et Beaucoup de bruit pour rien, se réunit à Beaumarchais, à Marivaux et crée un romantisme classique, sage au fond, débraillé en surface, pas toujours dans la mesure, rarement audacieux et donnant partout l’impression de cette qualité. Les Lamartiniens se perdent en des extases catholiques platement versifiées ; Barbier s’impose, rude et classique de ton, semblable à un Marie-Joseph de Chénier plus inspiré et doué du métier élargi des romantiques. La tentative de compromission entre le romantisme et le