Page:Julien - Histoire de la vie de Hiouen-Thsang et de ses voyages dans l’Inde.djvu/277

Cette page n’a pas encore été corrigée
177
LIVRE QUATRIÈME.

éléphants sauvages qui errent par centaines. C’est pourquoi les princes des deux royaumes de I-lan-na (Hiraṇya parvata) et de Tchen-po (Tchampâ) comptent dans leurs armées un nombre immense d’éléphants. En toute saison, ils envoient dans cette forêt, des chasseurs d’élégants, qui en prennent et les domptent pour traîner les chars. On y voit aussi beaucoup de loups, de rhinocéros et de léopards noirs, de sorte que personne n’ose traverser ces forêts.

Suivant ce que rapporte la tradition, anciennement, avant la naissance du Bouddha, il y eut un pâtre qui conduisait plusieurs centaines de bœufs. Quand ils furent arrivés au milieu de la forêt, l’un d’eux s’écarta du troupeau et s’en alla seul. Le pâtre le crut perdu. Le soir, le bœuf voulut revenir ; quand il fut arrivé au milieu du troupeau, il parut tout rayonnant et d’une beauté remarquable. Ses mugissements mêmes avaient quelque chose d’extraordinaire. Les autres bœufs furent tous saisi de crainte et n’osèrent rester devant lui. Cela ayant duré pendant longtemps, le pâtre en fut émerveillé et l’observa avec beaucoup d’attention ; mais bientôt il s’enfuit encore. Le gardien courut aussitôt à sa poursuite. Il le vit entrer dans le creux d’un rocher et l’y suivit. Quand il eut fait quatre à cinq li, le souterrain s’élargit tout à coup et se trouva comme éclairé par une grande lumière. Il aperçut alors un bois riant, rempli d’arbres chargés de fruits, et des plaines ornées des leurs les plus rares ; l’œil en était ébloui et charmé. C’était un spectacle ravissant que l’on ne saurait rencontrer