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COMITE CONSULTATIF CONSTITUTIONNEL

Avis du Comité consultatif constitutionnel. COMITE CONSULTATIF CONSTITUTIONNEL

Le président

Paris, le li août 1908.

Monsieur le Général de Gaulle,

président du conseil des ministres.

Comité consultatif constitutionnel

Le président


Paris, le 11 août 1958.


Monsieur le Général de Gaulle,
président du conseil des ministres.


Monsieur le président,

Lorsque, le 29 juillet dernier, vous avez remis solennellement au Comité consultatif constitutionnel le texte de l’avant-projet de Constitution établi par le Gouvernement, vous avez fait appel à sa collaboration et vous avez conclu : « J’espère qu’il sera dit dans l’histoire que le comité consultatif, aujourd’hui réuni, aura coopéré avec le Gouvernement que j’ai l’honneur de présider et, coopéré, j’ose le dire, avec moi-même dans cette entreprise capitale qui est actuellement en cours pour le salut de la République et le service du pays ».

C’est dans cet esprit que le comité a rempli sa mission. Il a travaillé avec la conviction que ses suggestions, qu’elles aient été ou non sanctionnées par un vote formel, feraient de la part du Gouvernement l’objet d’une étude, avec la volonté de les utiliser pour une œuvre qui est la condition du redressement français.

Le document I, ci-joint, est constitué par un tableau reproduisant, pour chaque article, le texte de l'avant-projet et, en face, le cas échéant, celui qui est proposé par le comité.

En vue d'informer pleinement le Gouvernement sur ses travaux, le comité a, par ailleurs, reproduit, dans le document II, également ci-joint, l'énoncé des propositions qui, sans avoir été adoptées, méritent d'être portées à sa connaissance, en raison du nombre des suffrages qu'elles ont recueillis ou de l'intérêt particulier qu'elles présentent.

J'ai maintenant l'honneur de vous indiquer, pour les problèmes les plus importants, dans quel état d'esprit le comité a été amené à faire ses suggestions. Elles s'inspirent des principes posés par la loi constitutionnelle et le comité a voulu qu'elles demeurent en harmonie avec les grands thèmes auxquels était attaché le Gouvernement et qui lui ont été exposés par vous-même.

Efficacité gouvernementale par des pouvoirs accrus et par la stabilité ministérielle, solution actuelle du problème de l'Afrique noire, tels ont été les buts essentiels que le comité a voulu atteindre. A cette fin, ses membres ont mis à profit l'expérience qu'ils ont des affaires publiques pour dégager des solutions concrètes et adaptées aux données permanentes de la vie politique française.


PREAMBULE

Certains, au dehors, ont soutenu que le silence du préambule de l'avant-projet sur les différents droits énumérés dans celui de la Constitution de 1946 équivaut à l'anéantissement de ces droits.

Il n'en est rien car le préambule de l'avant-projet, cité dans l'article 2 ter, se réfère expressément à celui de 1946.

Dans une addition au préambule, le comité a précisé que c'est sur la base des principes contenus dans les déclarations auxquelles il se réfère, et notamment sur celui de la libre détermination des peuples, que reposent les options offertes par la République aux territoires d'outre-mer.


DE LA SOUVERAINETE

La majorité du comité a pensé que la prochaine Constitution devait contenir une disposition imposant aux partis et groupements politiques le respect des principes démocratiques. Il est, en effet, convaincu que la rénovation des institutions de la République doit s'accompagner d'un assainissement de sa vie politique. Celle-ci ne peut, en particulier, s'accommoder des agissements antinationaux et antirépublicains de partis soumis à une obédience étrangère.


LE PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE
Article 4.
Collège électoral chargé de son élection.

Dans sa majorité, le comité a été soucieux d'éviter que, dans l'avenir, le Président de la République puisse être élu, un jour, avec une majorité si faible qu'il pourrait en être discrédité, au moment même où il entrerait en fonctions.

D'autre part, il a estimé nécessaire de faire figurer, dans le texte même de la Constitution, des indications suffisamment précises sur la composition du collège électoral qui élira le chef de l'Etat et sur le mode d'élection.

Article 9.
Référendum.

Le comité a pris acte, avec satisfaction, de l'esprit dans lequel est conçu le référendum qui ne peut être, en aucun cas, un moyen d'opposer le Gouvernement aux Assemblées. Pour souligner ce caractère, il a prévu, à la majorité, qu'il ne pourrait jouer que pendant la durée des sessions.

Article 11.
Pouvoirs exceptionnels.

Le comité a estimé, dans sa majorité, qu'en raison de la gravité de cette mesure, il y a lieu de préciser que l'exercice de ces pouvoirs est lié à une situation tout à fait anormale, essentiellement caractérisée par l'impossibilité où se trouvent les pouvoirs publics de fonctionner régulièrement et il a écarté toute autre hypothèse.

D'autre part, il a souhaité qu'une décision aussi grave recueille l'avis conforme du Conseil constitutionnel.


LE GOUVERNEMENT
Article 18.
Responsabilité devant le Parlement.

La réponse que vous avez faite à la question que j'ai eu l'honneur de vous poser, au nom du comité, lors de votre audition du 8 août dernier, ne laisse place à cet égard à aucun équivoque : « Le Gouvernement est responsable devant le Parlement, avez-vous dit, il n'est pas responsable devant le chef de l'Etat. »

Cette déclaration confirme et précise les textes mêmes de l'article 18 de l'avant-projet. Il en résulte que, malgré l'accroissement des pouvoirs du chef de l'Etat, c'est bien du régime parlementaire qu'il s'agit.

Par ailleurs, alors que la loi constitutionnel du 3 juin prévoyait la responsabilité du Gouvernement devant le Parlement, l'avant-projet mentionne seulement la responsabilité du Gouvernement devant l'Assemblée nationale. C'est la raison pour laquelle la majorité du comité suggère la formule suivante : « Le Gouvernement est responsable devant le Parlement. Cette responsabilité est mise en jeu devant l'Assemblée nationale suivant la procédure déterminée par l'article 45 ».

Article 21.
Interdiction du cumul entre une fonction gouvernementale et un mandat parlementaire.

Le comité a estimé, dans sa majorité, que cet article comportait des risques sérieux. L'interdiction de fait de l'accès au Gouvernement à des hommes politiques de valeur est susceptible de nuire au recrutement parlementaire et de créer entre le Gouvernement et le Parlement une atmosphère de suspicion, à quoi il faut ajouter le risque d'une certaine politisation de la haute administration.

Aussi, le comité suggère-t-il une solution différente de celle du Gouvernement au problème de la séparation de l'exécutif et du législatif : le parlementaire nommé ministre serait mis en congé, sans être remplacé au Parlement. Il ne pourrait participer aux votes et il se verrait interdire toute activité politique autre que gouvernementale.


DES RAPPORTS ENTRE LE PARLEMENT ET LE GOUVERNEMENT
Article 31.
Enumération des matières législatives.

Le comité a admis une répartition précise des compétences entre le Parlement et le Gouvernement. Il a même donné son accord au principe de l'énumération limitative des matières entrant dans le domaine du législateur.

Toutefois, l'énumération retenue par l'avant-projet lui a paru incomplète. Aussi, a-t-il rétabli sur le terrain législatif les matières qui, à son avis, ne doivent pas en être distraites.

Article 36.
Conseil économique et social.

Le comité, dans sa majorité, a approuvé l'essentiel des dispositions relatives au Conseil économique et social. Il tient, toutefois, à souligner le caractère communautaire qu'il doit avoir et il a indiqué qu'il dit constituer un lien entre les milieux économiques et scientifiques.

Il a prévu l'existence des membres associés susceptibles de faire de ce conseil un élément représentatif de l'ensemble de la zone franc.

Article 40.
Vote des lois.

Le comité a approuvé l'institution d'une commission mixte paritaire pour faciliter l'accord des deux assemblées du Parlement. Il a cependant voulu préciser le mécanisme de la navette qui doit assurer le dernier mot à l'Assemblée nationale sans rien enlever de leur poids aux positions prises par le Sénat.


LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL

Le comité donne son accord à la création du Conseil constitutionnel qui doit être un élément essentiel pour le fonctionnement harmonieux des pouvoirs publics. Les modifications qu'il propose n'ont pas d'autre objet que de préciser sa compétence et d'augmenter son autorité.