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L
PRÉFACE

en oubliant sa propre infortune. Le Journal perdit alors beaucoup de son intérêt, car ce ne sont pas des considérations générales sur les atrocités de la guerre, que personne d’ailleurs ne songe à contester, que l’on vient chercher dans ses pages.

Pendant le bombardement de Paris, des raisons de famille obligèrent Marie et les siens à s’installer à Lorient. Ce fut avec un véritable désespoir qu’elle accepta l’obligation de s’éloigner. Elle allait, au contraire, au-devant de la mort. Elle tomba bientôt malade d’une grippe infectieuse et fut, dès les premiers jours, considérée comme perdue, mais sa jeunesse et l’amour de la vie, lui permirent de lutter longtemps. Au cours de sa longue agonie, les pieuses visions de son enfance se penchèrent sur son lit de douleur. Son journal nous a montré que sa foi s’était peu à peu éteinte, mais elle avait cependant conservé un grand respect pour une formation religieuse dont elle avait reçu tant de beauté morale. Souvent elle disait à sa Mère que si elle avait des fils ou des filles elle les ferait élever dans des maisons religieuses. Malgré son apparente indifférence, le dernier lien entre son âme et ses chères croyances d’autrefois n’était donc pas rompu. Aussi reçut-elle en bienfaiteur le prêtre, qui lui apportait les consolations suprêmes. Elle répondit bravement aux prières de l’extrême-onction et rassura sa mère qui redoutait pour elle l’émotion d’un pareil moment. Pendant les jours qui suivirent un mieux sensible se manifesta