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ANNÉE 1904


Le Trez-Hir, 20 septembre.

L’esprit de ces cahiers me fatigue, cela m’ennuie de faire de la tristesse, j’en suis physiquement saturée. Quand je me réveille la nuit et le matin, je ne vois plus un bout par où prendre la vie ; l’instinct, le premier mouvement est pour la détresse. Un peu plus entrée dans la veille, les réactions commencent, cela change, je sais ne pas être plus tragique que cela n’en vaut la peine.

Ce qui me consterne, ce qui m’atterre, ce n’est pas l’avenir qui ne pourrait jamais être que meilleur, fût-ce la pleine vieillesse, mais ces quinze ans que j’ai derrière moi… Un matin, pendant ma fièvre typhoïde, j’ai été surprise, gênée, parce que je ne pouvais pas me rappeler si, toute la nuit, j’avais dormi ou veillé.