Page:Journal d’un bourgeois de Paris 1405-1449.djvu/71

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seilloit de tous ; et furent excommuniez de la bouche du Sainct Pere, tellement qu’ilz ne povoient estre absoulz par prestre nul, ne prélat, que du Sainct Pere et en article de mort. Et ii ou iii foys devant avoit [esté] faicte à Paris telle procession et tel excommuniement sur la faulce bande.

25. Item, le jeudi xiie jour de novembre, oudit an, fut mené le faulx traistre Colinet de Pisex, lui viie es halles de Paris, lui estant en la charrette sur ung aiz plus hault que les autres, une croix de fust en ses mains, vestu comme il fut prins, comme ung prestre. En telle manière fut mis en l’eschauffaust et despoullié tout nu, et lui coppa on la teste à lui vie et le viie fut pendu, car il n’estoit pas de leur faulce bande. Et ledit Colinet, faulx traistre, fut despecé les quatre membres, et à chascune des maistres portes de Paris l’un de ses menbres pandu, et son corps en ung sac au gibet, et leurs testes es halles sur six lances, comme faulx traistres qu’ilz estoient ; car on disoit tout certainement[1] que ledit Colinet, par sa faulce et desloyaute traïson, fist dommaige de plus de iie lyons[2] en France, sans plusieurs bonnes gens qui estoient avec lui, qu’il fist tuer les uns, les autres rançonner, les autres emmener en tel lieu que en ouy puis nouvelles, puis fist-on maintes justices.

26. Ce pendent, alla monseigneur de Guienne et de Bourgongne devant Estampes[3] qui estoit de la bande, et y furent par

    bailli de Caen, lequel s’assura de leurs personnes et envoya à Paris leurs lettres et instructions. La gravité du fait motiva une réunion extraordinaire du conseil à Saint-Pol, sous la présidence de Charles VI : il y fut procédé à l’examen des papiers saisis, et le chancelier de Guyenne donna lecture d’un « petit advisement » sur le gouvernement, de la composition de frère Le Grant, trouvé au milieu de ces documents. (Cf. Monstrelet, Juvénal des Ursins et le Religieux de Saint-Denis.)

  1. Ms. de Paris : mesmement.
  2. Ici, un mot est resté en blanc dans le manuscrit de Paris.
  3. Au témoignage de Monstrelet (t. II, p. 222), les ducs de Guyenne et de Bourgogne partirent de Paris le 23 novembre, tandis que suivant l’Itinéraire de Jean Sans-Peur dressé par M. Gachard, le duc de Bourgogne aurait quitté Paris vers le 20 novembre et aurait séjourné du 20 au 27 à Corbeil où se trouvait le duc de Guyenne ; d’après une lettre de rémission d’avril 1412 (Arch. nat., JJ 166, fol. 118), ce ne fut que le 5 ou 6 décembre « qu’ils entreprindrent le voyage d’aler à Estampes. » Louis de Bosredon, sénéchal de Berry, chargé de défendre cette place, opposa une vigoureuse résistance et ne se rendit qu’à la dernière extrémité ; quoique Juvénal des Ursins prétende qu’il ne fut point considéré comme prison-