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désintéresse de toutes les conditions de paix, dites « garanties de paix » lesquelles me paraissent tout aussi bien des garanties de guerre : ce n’est jamais d’une paix que peut sortir le paix. Il n’y a pas de victoire qui la donne. Elle relève d’une tout autre préparation pour laquelle les diplomates n’ont jamais fait leurs preuves, pas plus que les meilleures têtes de nos con- temporains. Ils n’en sont pas là ! Et moi qui ne veux plus juger les hommes que du point de vue de la paix, à peu près comme Pascal les jugeait du point de vue de Dieu, je sens toutes les saintes colères et toutes les verges du Jansénisme me passer dans la main.

Le Trez-Hir, 13 août.

À Marie G… : O stupidité monstrueuse, qui ne dure, qui ne s’est maintenue dans nos époques modernes, qu’à la force des poignets des stupides, Chose inutile et folle, dont à force de lui répéter qu’elle ne peut pas s’en passer, l’humanité est arrivée à le croire. Avez-vous la patience de lire les journaux quand ils parlent des « buts de la guerre » ? 1 !  !

À tante Gabrielle : La lecture de l’Echo de Paris et de ses diplomates est harassante ; ce n’est pas qu’ils aient tort. Il est évident qu’à la paix il faudra prendre tout ce qui pourra nous rendre plus forts dans la prochaine guerre, quitte à ce que cette prochaine guerre nous l’enlève. Mais appeler cela des garanties de paix ! Il y a une vérité de La Palice qui serait bonne à vulgariser, c’est que la paix ne nous sera donnée que par le pacifisme. |

Dans un article sur Yuen-Chekaï : « Dans les dernières an- nées de la dynastie, les hommes d’affaires, les financiers, les grandes maisons d’armements d’Europe et d’Amérique avaient formé un vaste projet. Afin de pouvoir tirer de cet immense pays les bénéfices de l’exploitation de ses richesses, on avait formé un consortium, composé de banques importantes d’Al-

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