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Laugier faisait partie de ma galerie, j’éprouve un sentiment de dommage à la voir se dépeupler. Encore celui-ci n’étaic pas grand’chose, mais je sens que si trois ou quatre hommes dont je n’ai vu qu’un seul, plus une femme, disparaissaient, je me découragerais d’être, je ne me soucierais pas d’exister pour les autres, et je me considère comme une de leurs raisons de vivre, Car ce n’était pas la peine d’écrire, s’il n’y avait pas des lecteurs comme moi..

Nous n’existons que les uns pour les autres, nous sommes tout ce qui nous reste, voilà ma philosophie.

16 février.

Je disais à maman : notre théâtre est « immoral » pour prouver la moralité. Moi, je vais faire une pièce morale et l’on ne sait pas du tout ce que cela prouvera.

; 28 février.

Nous quittons cet appartement commode et joli avec ses fenêtres sur le parc de l’hôtel St-Senoch, qui prend tout un côté de la rue, et que j’avais découvert avec émerveillement un jour de neige. Nous allons vivre à l’hôtel, dans une pension de famille. Maman donne des raisons d’ordre matériel et jy insiste aussi. Tous disent : « On n’est jamais mieux que chez soi, la liberté… » Vraiment ? votre liberté ? C’est précisément ce chez moi que je veux fuir. Avec quel découragement jy suis rentrée chaque jour pendant des années, avec quel dégoût de la maison où jeune fille je vis en vieille femme. La maison n’a de raison d’être que par la famille, autrement elle n’est qu’un bien-être mesquin de vieille rentière, propriétaire de ses meubles : « Le mobilier, voilà ce que l’homme a de plus cher au mondel » Il n’y a pas de solitude que le mobilier ne console.

Certes, je les aime toutes nos vicilles choses, mais parce qu’elles me rappellent Brest. Je me sens l’âme d’une seule