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ANNÉE 1901

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7 lévrier.

Nous nous tmitons très mal. Nous n’avons ni l’intelligence, ni l’audace, ni la force de notre sincérité. Pourquoi ne cher- chons-nous pas cela ? Ce n’est pas seulement notre pensée écrite, imprimée, qui doit nous interpréter. Il faut penser avec notre voix, notre sourire, notre corps. Etre une belle œuvre de style des pieds à la tête. Une femme surtout devrait vouloir cela.

Ce que disait le Père Gratry, que ce ne sont pas les âmes qui refusent d’aimer, mais la plupart des humains de mériter l’amour. Nous sommes tous plus ou moins ridicules et assom- mants, paresseux, lâches et négligents. De toutes les vies que nous pouvions vivre, nous choisissons l’exemplaire minima. Oh ! je comprends toutes les « trahisons » sentimentales ; ce n’est pas elles qui commencent !

Mercredi 13.

On dirait que nous avons wn tirant de solitude, que notre âme déplace un vide, et qu’il lui faut une poussée d’espace vierge, d’isolement, pour garder sa ligne de flottaison.

Et pas seulement nos âmes, nos corps aussi. Comment peut- on résister à la suppression du système cellulaire ? Sans aller aussi loin, quel supplice de marcher à un pas qui n’est pas le vôtre, comme tous les rythmes s’insurgent ! Les muëttes con- tradictions physiologiques, quelle épuisante réfutation pour nos nerfs ! Je me représente l’amour comme une concordance exceptionnelle du mouvement, le miracle de l’étoile double.

Samedi 16.

J’ai fait un progrès. Je commence à soupçonner l’art des suppressions. Cela ne veut pas dire écarter le médiocre, mais aussi l’excellent. Il faut apprendre à s’exprimer avec ce qu’on