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JOURNAL DE MARIE LENÉRU

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Maman a reçu des nouvelles de Mica1, il paraît qu’elle gran- dit beaucoup, cela m’ennuie un peu.

La mère St-Vincent de Paul vient de faire une visite à ma- man ; la sœur de la Mère du Sacré-Cœur s’appelle Mère Saint- Louis de Gonzague. Je n’aime pas beaucoup les Augustines ; il me semble qu’elles ne sont ni contemplatives, ni actives, et puis, les religieuses, à table, n’ont pas un charmant caractère, Cela n’empêche pas qu’elles valent bien mieux que moi, mais les Oratoriennes me semblent bien plus saintes. Aujourd’hui, je vais parler de la Grande Rivière où nous étions l’année der nière à cette époque. Dès que nous avions fini de dîner, nous descendions sur la route et nous nous asseyions sur la fenêtre des d’Auriac qui finissaient de dîner, souvent, nous profitions de leur dessert ; André nous appelait les « ballons », probable- ment à cause de nos capulets, Sur la route nous faisions de superbes parties de grâces et de volants, mais souvent nous les envoyions sur la grève, alors ils restaient attachés à.la falaise, nous étions perdus ; un soir qu’un arceau y était allé, Tonton Alb. (Albert d’Auriac, il nous avait autorisé à l’appeler comme cela pour éviter la confusion) avait voulu aller le chercher ; c’était extrêmement dangereux et nous nous étions tous récu. sés : cet anneau-là resta perdu ; souvent c’était chez Mme Pi- Card que nous faisions des parties de grâces et de volants : comme Henriette est très lente, Tonton Alb. lui criait toujours plume, plume ! La plus belle partie que nous ayons faite, c’était tout en haut de la colline, dans le champ de Mme Picard, Quand nous ne sortions pas, nous nous tenions ou dans notre salle à manger, ou en bas, chez tante Blanche, on jouait au Sphinx ; je me rappelle que maman et Tonton Alb. sont restés toute une soirée sur le mot « crépuscule » que je leur avais donné. J’aimais mieux en donner, car je les devinais très mal. Henriette avait donné à Tonton Alb. un mot duquel il ne pou- vait faire que « vieux cahier », et il répétait tout le temps, « vieux cahier », et c’était « archives » ! On lisait aussi mes bro-

1. Caniche appartenant à Mne Lenéru.