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avait refusé. Un jour, il m’avait mise à cheval devant lui sur sa jument May Queen et m’avait promenée dans tout Brest. Je me rappelle qu’il avait beau me recommander de me jeter en arrière, chaque fois que le cheval levait la tête sa crinière me balayait la figure. J’avais aussi beaucoup d’inquiétudes sur le sort du chien qui nous suivait. « Mr, White » — je le faisais siffler tout le temps. Maman avait été furieuse de cette prome- nade. Dans une demi-heure on va dîner ; je remonte.

Aujourd’hui, nous sommes allées chez M. de Lacharrière, Société générale, pharmacien, confiseur et pâtissier. M. de La- charrière veut absolument que je fasse des progrès pour la lec- ture sur les lèvres ; il a dit à maman qu’il avait vu dans un bal une jeune sourde causer avec son danseur, sans qu’on puisse soupçonner sa surdité ; et elle ne prend pas de leçons. Il con- naît aussi des jeunes gens qui lisent le français l’anglais et l’allemand.

Mercredi 11 juillet.

Mon genou a recommencé ses petites bêtises, alors au lieu d’aller à l’Exposition, je reste ici. Je préfère même cela. Lors- que les Dauriac et Corrard seront ici, j’aurai bien le temps d’y aller,

Hier, j’ai cherché parmi mes livres de piété celui dont je compte faire mon manuel. J’ai choisi les conseils de piété qui me conviennent admirablement ; c’est singulier comme ce grand Bossuet a su descendre dans les moindres détails de direction. Mgr de la Bouillerie l’explique d’une façon char- mante en disant : « quand on a le vol de l’aigle on a facilement celui de la colombe ». Sur la première page j’ai écrit toujours les mêmes stances de Ste Thérèse et ces mots dont je veux faire ma devise : « Aimer. Souffrir. Attendre… » Je lis beaucoup la Bible et les pensées de Lacordaire et je vérifie dans Perles éparses les passages de la Bible protestantanisés. Les diffé- rences ne paraissent guère, mais lorsqu’on approfondit, c’est incroyablement différent.