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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


chez les Romains, des gardes à l’accusateur… Je consens que la preuve de l’innocence de l’accusé soit renvoyée à la fin de l’instruction, et que cet acte, qui devrait la commencer, la termine. Oui, que l’accusateur soit libre, que l’accusé soit en prison ; que l’accusateur produise, à son gré, à son aise, successivement, autant de témoins qu’il voudra ; et que l’accusé ne puisse indiquer les siens qu’à la hâte, à la fois, dans un moment ; qu’enfin l’accusateur combatte les yeux ouverts, au grand jour, armé de cent lois, et l’accusé, au contraire, les fers au pied, dans la nuit, seul ! Mais je demande que l’accusé puisse au moins combattre ! Je demande que la justice soit contrainte, au moins, de lui ouvrir la barrière[1] ! » Ainsi parlait Du Paty, l’ancien, sous Louis XVI, trois ans avant la Révolution. Or, le Jésuite ayant surgi à nouveau sur les désastres de la Patrie, — car il monte chaque fois que la Patrie baisse[2], — voici l’autre Du Paty, cent cinq ans après la Révolution, à la tombée du siècle, dans l’épanouissement de toutes les libertés.

  1. Mémoire, p. 124 et 125.
  2. Gambetta, Discours, VIII, 243 : « C’est toujours quand la patrie baisse que le Jésuite monte. »