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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


Le lendemain, 2 novembre, comme les journaux continuent à mettre l’Italie en cause, Panizzardi télégraphia en chiffres : « Si le capitaine Dreyfus n’a pas eu de relations avec vous, il conviendrait de charger l’ambassadeur de publier un démenti officiel, afin d’éviter les commentaires de la presse. »

Le général Marselli répondit, le même jour, par dépêche : « L’État-Major italien et tous les services qui en relèvent n’ont jamais eu de rapports directs ou indirects avec le capitaine Dreyfus[1]. »

Des communications analogues, qui n’ont pas encore été publiées, furent échangées entre Schwarzkoppen et Berlin. Dès qu’il connut l’article de la Libre Parole, le chef du grand État-Major télégraphia à tous les attachés militaires allemands. Tous répondirent, de Paris, Rome, Berne et Bruxelles, qu’ils entendaient pour la première fois le nom de l’officier arrêté. Schwarzkoppen et Panizzardi donnèrent aussi, à leurs ambas-

    taire d’ambassade, à la Cour de cassation (Cass., I, 400) : « L’arrestation du capitaine Dreyfus a produit, ainsi, qu’il était facile de le supposer, une grande émotion. Je m’empresse de vous assurer que cet individu n’a jamais rien eu à faire avec moi. Les journaux d’aujourd’hui disent en général que Dreyfus avait des rapports avec l’Italie ; trois seulement disent, d’autre part, qu’il était aux gages de l’Allemagne. Aucun journal ne fait allusion aux attachés militaires. Mon collègue allemand n’en sait rien, de même que moi. J’ignore si Dreyfus avait des relations avec le commandement de l’État-Major. » — À Rennes (I, 280), Roget déposa que Panizzardi avait, à cette même date, adressé un rapport à l’ambassadeur d’Italie, Ressmann, où il aurait déclaré que « Dreyfus trahissait pour le compte de l’Allemagne ». Panizzardi télégraphia aussitôt de Rome, 17 août : « Ce rapport n’a jamais existé, cette déclaration n’a jamais existé. » Il ajoutait : « Je n’ai appris le nom du capitaine français qu’à l’époque de son arrestation, comme, du reste, je l’ai déclaré par écrit et par voie officielle, sur mon honneur de soldat et de gentilhomme. » Roget, sous ce démenti, se tut.

  1. Cette dépêche a été communiquée dans les mêmes conditions que le rapport de Panizzardi. (Cass., I, 400.)