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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS


tait de deux ou trois ans, qu’Henry avait autrefois reconstituée lui-même[1] et qui, elle aussi, était écrite au crayon bleu[2] et sur du papier quadrillé. Seulement le quadrillage de cette lettre était en violet pâle[3], d’un rouge lie de vin[4], tandis que le quadrillage de l’autre était en gris bleuté[5]. Différence très légère de nuance dont il ne s’aperçut pas et qui n’est, paraît-il, visible qu’à la lampe[6]. De plus, l’écartement des rayures verticales et des rayures horizontales du quadrillage[7] n’est pas exactement le même sur les deux papiers.

Les plus grands capitaines ont de ces distractions.

De ces deux lettres authentiques, Henry forgea deux faux.

Il en confia l’exécution matérielle à l’un de ses agents secrets, qui avaient fait tous les métiers et avait

    disparaître, supprimait cette existence. » (Dép. à Londres, Éd. de Bruxelles, 90.) Seul, Gonse dépose que « la pièce en bleu n’a jamais été au dossier secret ». (Rennes, I, 555.)

  1. Revision, procès-verbal, 100, Henry. — Lauth dit que « c’est probablement lui-même qui a dû la recoller », mais qu’il est possible que ce soit Henry. (Rennes, II, 214.) Il indique un moyen de contrôle ; Lauth recollait avec une bande, coupée en longueur, d’à peu près un demi-centimètre de largeur ; Henry avec la bande d’une largeur complète.
  2. Cass., II, 354, Gonse. — La pièce et son enveloppe portent, au dossier secret, les nos 367 et 368.
  3. Revision, procès-verbal, 102, Cavaignac.
  4. Cass., I, 339, Cuignet.
  5. Ibid., — Revision, procès-verbal, 102, Cavaignac : « En gris bleu. »
  6. Cass., I, 339, 340 ; Rennes, I, 515, Cuignet. — Roget, comme Cuignet, n’aperçut les différences de coloration qu’à la lumière de la lampe (Cass., I, 121) ; Cavaignac dit « qu’il ne put pas apercevoir la différence de coloration qui avait frappé Cuignet » (Rennes, I, 198) et « qu’elle ne lui était pas apparue assez nettement pour le convaincre » (I, 199). Enfin, Roget déclare « qu’il ne fut convaincu que par l’aveu d’Henry » (Rennes, I, 319).
  7. Rennes, I, 199, Cavaignac : « Les rayures ne coïncidaient pas. » C’est l’expérience de contrôle à laquelle il fit procéder par Cuignet (Rennes, I, 502).