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HISTOIRE DE L’AFFAIRE DREYFUS

XI

Gonse, en terminant sa lettre (du 10 septembre), annonce son retour au ministère pour le 15. Le 12, Boisdeffre part pour les grandes manœuvres jusqu’au 18[1]. Le 14, l’Éclair publie un véritable mémoire intitulé : « Le traître. »

Le rédacteur anonyme expose, d’abord, les raisons graves, « patriotiques », qui lui font un devoir de révéler, « courageusement », toute la vérité, la preuve « irréfutable qui a décidé l’unanime verdict des juges de Dreyfus ». C’est que « le châtiment du traître ne sera entier que si la conviction de sa culpabilité est absolue » ; « il ne faut pas qu’une seule conscience accorde au misérable les bénéfices du doute ». Or, « une scandaleuse légende » se forme autour du nom de Dreyfus. Et, « puisque le gouvernement ne croit pas pouvoir se départir de la réserve que lui dicte une prudence toute diplomatique », l’Éclair va « étaler au grand jour la preuve qui n’a pu être produite, même au jour discret de l’audience », au huis clos. Son récit ne sera l’objet « d’aucun démenti, si timide qu’il soit ». Ainsi seront vengés les juges de Dreyfus, « accablés, depuis trop longtemps, sous le poids d’un cruel soupçon ».

Suit « l’historique » du procès. — Dès les premiers jours de 1894, des fuites furent constatées à l’État-Major ; Boisdeffre prescrivit une enquête, acquit la preuve que l’Allemagne avait été informée « des modi-

  1. Instr. Fabre, 59, Boisdeffre.