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et gardent pour eux seuls les sommes, quelquefois considérables, qui leur sont envoyées. Ce traitement doit paraître peu équitable aux prêtres chinois, et est tout à fait de nature à faire naître en eux de l’antipathie pour les Européens.

Il est telle mission où les prêtres européens ne voudraient pas manger à la même table que les Chinois ; on les regarde comme des êtres inférieurs et des parias. Voilà les causes de l’éloignement que les Chinois témoignent quelquefois pour les Européens. Dans les missions où l’on a pour règle de ne faire aucune distinction entre les indigènes et les missionnaires d’Europe, soit pour les aumônes, soit pour la table, on a toujours vu régner la plus intime union.

Si, dans quelque pays de l’Europe que ce soit, un clergé étranger se partageait à son gré les dignités et les richesses de l’Église, et qu’on traitât les clercs du pays comme des serfs et des gens dégradés, on n’aurait certainement pas pour ces étrangers la déférence de la charité que les Chinois, dont nous venons de parler, conservent encore pour leurs missionnaires européens.


Attachement à leurs usages.

Enfin, on reproche universellement aux prêtres chinois une attache excessive pour les usages et les institutions de leur pays ; on va même sur ce sujet, jusqu’à les accuser d’ingratitude, comme si la reconnaissance leur faisait un devoir de se plier aux coutumes européennes.

Il faut d’abord observer que ces reproches ne sauraient se rapporter aux usages condamnés par l’Église ; les Chinois donnent, sur ce point, l’exemple de la fidélité et de la soumission la plus aveugle pour les ordres du Saint-Siège.

Cette attache, dont on leur fait un crime, porte donc sur des coutumes purement civiles, indifférentes à la religion, et sur lesquelles la loi de Dieu ne dit rien. Ils sont donc parfaitement libres à cet égard, et il y a injustice de prétendre leur en faire un crime.

Chacun concevra encore combien il serait peu sage, pour les prêtres chinois, de changer les usages de leurs pères pour prendre ceux des peuples étrangers ; ils se rendraient odieux à leurs compatriotes, et se fermeraient auprès d’eux toute voie de succès. Et si, dans ces choses, il en est qui doivent