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Dans ces circonstances vraiment lamentables, le bruit des dissensions perce peu à peu et remplit de trouble les populations païennes ; on abhorre ces disputes, et la haine qu’on leur voue, retombe sur la religion chrétienne, qu’on accuse d’en être la cause ; le Christianisme est regardé comme une secte de gens brouillons et inquiets, et cette réputation le fait répudier par avance.

Les contestations élevées à l’occasion des rites chinois, donnèrent lieu à des excès si nombreux et si criants que pour rétablir la paix, le gouvernement chinois ne vit d’autre moyen que de proscrire entièrement le Christianisme, et telle fut l’origine de cette longue persécution qui dure encore aujourd’hui.


Persécution de 1805.

Dans l’année 1805, la persécution prit un redoublement terrible d’intensité et de fureur. Or ce furent encore les contestations entre les missionnaires qui en furent la cause. On se disputait au sujet d’une chrétienté que les parties diverses prétendaient chacune avoir sous leur juridiction : l’un des contendants dressa une carte des lieux et l’envoya à la sacrée congrégation, en sollicitant d’elle une sentence décisive. Dans la route, la carte tomba entre les mains des infidèles. Les Chinois déjà impatientés de toutes ces querelles, dont ils ne pouvaient comprendre la cause, demeurèrent persuadés que les vues des prêtres européens étaient évidemment de s’emparer du pays, puisqu’ils s’en disputaient déjà la possession avec un tel acharnement. De là le Christianisme fut regardé comme un moyen d’invasion mis en œuvre par un peuple ennemi ; des lois terribles furent de nouveau portées contre lui et ce préjugé a formé dès ce jour devant la religion, une barrière qu’elle n’a pu encore surmonter.

De ces contestations entre les missionnaires résulte aussi et plus immédiatement encore la diminution de la foi chez les néophytes. Le caractère d’apôtre sous lequel ils avaient. jusqu’alors considéré le prêtre, disparaît pour ne plus laisser voir qu’un homme ambitieux, sans zèle pour le véritable bien et souvent sans loyauté dans ses démarches.