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les intérêts privés contre la chicane de ces légistes autrichiens, qu’il maudissait. Ce Théodore (Tudor pour les siens), originaire de Vladimir, d’où son nom de Vladimirescu, avait été aussi un des officiers des pandours indigènes que les Russes avaient employés dans leur dernière guerre contre les Turcs. Comme il avait pris part à des raids en Serbie, il y avait connu l’armée rustique de Carageorges, qui, tout en combattant sans relâche, représentait en même temps 1’ « Assemblée du peuple », d’un peuple qui, ayant rompu avec son « Empereur » païen, n’entendait plus avoir d’autre maître que ceux qu’il se choisirait au milieu des guerriers. Tudor s’enrôla par un serment secret dans l’armée future de l’Hétairie. Mais, quand l’heure de l’action fut venue, il se rendit compte, avec son instinct populaire, qu’il s’agissait d’une cause qui n’était guère la sienne. Au dernier moment, avant la levée des drapeaux, averti par le consul russe, le Grec Pinis, un des chefs de la conspiration, il avait quitté Bucarest, emportant l’étendard bleu à l’aigle valaque sous lequel devait s’assembler, avec une étonnante rapidité, son armée de pandours. Il occupa les monastères fortifiés, comme l’avait fait jadis, contre le prince grec Léon, Mathieu Basarab, dont il reprenait, à la paysanne, la tradition. Le vieux prince Alexandre Sutu (Soutzo) venait de mourir à Bucarest, et Tudor n’avait devant lui que les représentants sans autorité de l’interrègne. Bientôt on le vit arriver à Bucarest, où il fit son entrée à cheval, portant le bonnet au fond de drap blanc que s’étaient jusque là réservé les princes ; les siens acclamaient le « Domnul Tudor », le « prince Tudor » ; parmi les quelques boïars qui étaient restés dans la Capitale et qu’il faisait surveiller de près, il y en avait qui auraient été disposés à reconnaître momentanément cette dictature d’un caractère si inattendu et plein de menaces. Il leur parla ainsi qu’aux