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madame d’youville

monde eut pour elle des attraits, » dit M. Sattin ; « elle ne fut point ennemie des plaisirs et de la société. »

Les premiers colons avaient peu de distractions ; comme nous l’avons déjà dit, ils vivaient comme les membres d’une grande famille ; les réunions étaient donc intimes et fréquentes, et ils pouvaient ainsi passer plus agréablement les longs hivers et briser la monotonie de leur existence. Ces distractions, pourtant bien légitimes, furent refusées à Mme d’Youville ; elle fut obligée, pour vivre en paix, de sacrifier tous ses goûts et de s’enfermer, à vingt ans, avec une vieille belle-mère acariâtre et impérieuse.

Ce que fut cette existence, dans les conditions que nous venons de décrire, on le comprend sans peine. Les souffrances et les contrariétés rencontrées à chaque instant dans ce contact continuel de deux natures peu sympathiques, les renoncements répétés que cette vie si peu en harmonie avec ses goûts exigeait d’elle, auraient été une raison de plus pour Mme d’Youville de s’attacher plus fortement à son mari, si elle avait trouvé chez celui-ci un cœur digne de la comprendre. Mère heureuse, épouse aimée, elle eût alors facilement oublié les tracasseries de sa belle-mère ; mais Dieu, qui la voulait sienne et qui avait daigné la choisir pour fonder l’une des plus belles œuvres du pays, la préparait peu à peu à sa mission en lui envoyant ces épreuves, qui dissipaient ses illusions et assuraient son détachement de tout ce qui