Page:Jetté - Vie de la vénérable mère d'Youville, 1900.djvu/376

Cette page a été validée par deux contributeurs.
334
vie de

Sœur Lapointe écrit : « … La pluie dura quinze jours sans interruption, sauf quelques instants où un soleil brûlant se faisait jour à travers les nuages et répandait des charbons ardents sur nos têtes. Ai-je besoin de vous dire : combien la marche était pénible, combien le repos était triste ? Souvent il fallait préparer nos lits dans des marécages, sur la terre nue. Nos couvertures, nos robes, nos manteaux, trempés par la pluie de la journée, ne pouvaient guère nous préserver de la fraîcheur des nuits… Il semble que cet état de choses devait nuire à notre santé, et cependant, grâce à Celui pour qui nous nous sacrifions et qui nous garde comme la prunelle de son œil, pas une de nous n’éprouva la moindre indisposition.

« Nous éprouvions de longs retards : les torrents étaient devenus de grandes rivières et les ruisseaux des torrents impétueux ; et cependant il faisait plaisir de voir combien nos conducteurs étaient habiles à se tirer des mauvais pas. En quelques instants, nos petits chars de voyage, enveloppés d’une grande peau de parchemin, étaient lancés sur la rivière et devenaient des barques, de gros transports. On attachait une corde à chaque extrémité, et les hommes, debout sur les deux rives, hâlaient tour à tour cette embarcation improvisée.

« Il ne s’agissait plus de marcher deux ou trois heures, mais deux ou trois jours, tantôt dans une épaisse forêt, tantôt sur des rives escarpées, enfonçant à