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madame d’youville

rie de Châteauguay et avait même commencé à y faire faire la coupe du bois ; on vient prévenir la Mère Lemaire de cet empiètement. À l’instant elle part avec une trentaine d’hommes et se met à faire défricher elle-même, afin d’affirmer publiquement son droit de propriété.

Une autre fois, c’est aux ingénieurs du canal de Lachine qu’elle résiste. Ceux-ci ayant planté des piquets sur la propriété de l’Hôpital Général pour le tracé du canal, la Mère Lemaire vint hardiment les arracher, et les ingénieurs furent forcés d’aller tracer leurs lignes ailleurs.

Cette énergie si virile était cependant tempérée par une grande bonté et les étrangers mêmes en firent l’épreuve. Se trouvant un jour à Châteauguay, on vint lui dire qu’un Anglais blessé souffrait horriblement d’une balle qui n’avait pas encore été extraite. La Mère Lemaire le fait venir, lui fait préparer un bon lit et, avec une habileté digne d’un chirurgien, elle extrait la balle de sa plaie. Elle compléta son œuvre de charité en le gardant et en le soignant jusqu’à son entière guérison. Le pauvre blessé ne cessait pas de la remercier et de la bénir.

Une autre fois, ce sont des cris de détresse qu’elle entend et auxquels elle accourt. Du rivage elle aperçoit une barque engagée dans les glaces, car on était aux froids de l’automne, et cette barque ne pouvait ni continuer au large ni aborder au rivage. La Mère Lemaire ne perd pas son sang-froid ; elle appelle les