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madame d’youville

La maison de Mme d’Youville était si bien connue comme un asile pour toutes les infortunes que souvent de pauvres malheureux, poursuivis par leurs ennemis, s’y réfugiaient avec confiance. Elle en recueillit plusieurs qu’elle arracha aux mains des sauvages, et l’on sait quel sort les attendait de la part de ces barbares. Elle les cachait et les faisait ensuite évader au premier moment favorable. « Elle usa même, » dit M. Faillon, « de différents stratagèmes pour protéger leur sortie de la maison. Elle les enveloppait dans les grands manteaux avec lesquels elles sortaient l’hiver et réussissait ainsi à leur sauver la vie. »[1]

Un jour, un jeune homme, poursuivi par un sauvage ivre de colère, se réfugie à l’Hôpital Général et court jusqu’à la salle de communauté, où Mme d’Youville était à faire une tente. Sur un signe d’elle au fugitif, celui-ci se réfugie sous sa lourde pièce d’ouvrage, où elle fut assez heureuse pour le cacher avant l’entrée de son ennemi. Lorsque parut le sauvage, elle lui indiqua d’un geste une porte ouverte en arrière d’elle ; il se hâta d’y passer, croyant atteindre par là le jeune homme qu’il poursuivait. Comme il est facile de le comprendre, grande fut la reconnaissance de celui à qui Mme d’Youville venait de sauver la vie avec tant de sang-froid ; nous verrons plus tard qu’il ne l’oublia pas.

  1. Vie de Madame d’Youville, p. 147.