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En 1756, sur la demande de l’intendant Bigot, Mme d’Youville commença à recevoir dans son hôpital des prisonniers de guerre malades ou blessés ; mais ils devinrent en peu de temps si nombreux qu’il fallut bientôt leur assigner, pour eux seuls, une vaste salle, que l’on appela « salle des Anglais ».

Touchée de la misère qui les attendait après leur sortie de l’hôpital, Mme d’Youville cherchait à leur procurer de l’ouvrage et elle-même en employait jusqu’à trente par année, ainsi qu’on a pu le constater par ses livres de comptes. La reconnaissance engagea plusieurs d’entre eux à se donner à la maison, et l’un d’eux, connu sous le nom de John, que la fondatrice avait sauvé des mains des sauvages, rendit de grands services comme infirmier et interprète auprès de ses compatriotes et des sœurs. Celles-ci connaissaient si peu la langue anglaise qu’elles ne pouvaient pas même, dit M. Faillon, prononcer les noms des soldats anglais qui étaient à leur service : elles les désignaient sous les noms de Christophe l’Anglais, John l’Anglais, etc.[1]

Ces charges que s’imposait Mme d’Youville demandaient d’elle de grands sacrifices, et elle dut même contracter de nouveaux emprunts pour faire vivre tout ce monde. Malgré ce nouvel embarras, elle trouva souvent moyen de racheter des captifs destinés à être brûlés et torturés par les sauvages.

  1. Vie de Madame d’Youville, p. 146.