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CHAPITRE XXXI


Le ministère Charles Dupuy. — Manifestations russophiles. — Assassinat du président Carnot. — L’affaire Dreyfus. — Élection de M. Casimir-Périer. — M. Félix Faure, président de la République. — Élection de M. Loubet. — Le mouvement nationaliste et l’agitation révisionniste. — « L’Histoire socialiste ».


Le 7 juillet 1893, M. Dupuy, qui avait eu la main si gauche et si lourde dans l’affaire Nuger, ferma la Bourse du Travail de Paris, provoquant de ce fait des troubles graves. Cette mesure qui eut son retentissement à la Chambre et à l’Hôtel de Ville où les élus socialistes blâmèrent en termes énergiques l’acte gouvernemental, fut diversement apprécié parmi les militants, alors qu’il était presque unanimement approuvé par la presse de toutes les fractions des partis conservateurs et du parti républicain. La Commission d’organisation du Congrès de la Fédération des Bourses du Travail qui devait se tenir cette même année à Toulouse, disait dans son rapport : « L’idée des Bourses a plus fait, pour fortifier le mouvement syndical, que dix années d’efforts des militants, aussi bien que M. Dupuy a plus fait, en fermant la Bourse de Paris et en attaquant les syndicats que vingt années de propagande. »

D’autre part, le citoyen Jules Guesde dans le Matin, déclarait que M. Dupuy « en encombrant de sa police et de ses troupes à cheval l’impasse corporative dans laquelle menaçaient de s’égarer un trop grand nombre de travailleurs, avait rejeté dans le mouvement politique, c’est-à-dire dans la vraie voie socialiste, le parti ouvrier tout entier, désormais convaincu qu’en dehors du gouvernement conquis par la classe ouvrière, il n’a pas de salut, pas d’émancipation du travail. »

Ce qui devait surtout résulter de l’acte du président du Conseil, c’était une recrudescence d’activité révolutionnaire des éléments dont l’action se faisait sentir parmi les organisations ouvrières qui allaient faire une série d’efforts pour se soustraire à l’influence politique des propagandistes et de divers partis socialiste constitués.

Les élections municipales de 1892 et de 1893 avaient été signalées par de notables progrès du parti socialiste ; de leurs candidats un nombre relative-