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nous revendiquons hautement, comme un droit primordial, inaliénable, le droit de réunion et d’association, sans restriction aucune, et nous nous déclarons décidés à poursuivre, par tous les moyens dont nous pouvons disposer, la discussion des projets des statuts de notre fédération. » (Troisième procès, p. 31).

C’est sur ces entrefaites, au milieu de tout ce travail d’organisation, que s’ouvrit le 4e Congrès de l’Internationale, à Bâle. Il se tint du 6 au 12 septembre. Les ouvriers parisiens y avaient envoyé une délégation nombreuse. Tous les mandants n’étaient pas affiliés ; mais les mandataires promirent l’adhésion collective de leurs sociétés et furent admis au Congrès. La délégation française se ressentait ainsi du caractère de l’Internationale nouvelle, vaste foyer de propagande plutôt que groupement régulier. Parmi les vingt-six délégués français, il faut citer Aubry, assisté de deux camarade normands, délégués de Sotteville et d’Elbeuf, Varlin, Landrin, Murat, Pindy, Franquin, des lithographes, Langlois, le proudhonien, le cordonnier Chemalé, Tartaret ; Albert Richard et Bakounine, qui, avec deux autres camarades représentaient les sociétés lyonnaises ; Boudet de la section de Limoges ; enfin Tolain, dont le mutuellisme n’avait pu trouver une délégation à Paris et qui représentait les boulangers de Marseille.

Les mutuellistes, en effet, qui sentaient de plus en plus décliner leur influence, avaient fait à Paris des efforts désespérés pour se faire déléguer au Congrès de Bâle par les sociétés ouvrières. Dans une lettre du 3 septembre, qu’il faisait porter à Richard par un congressiste à Bâle, et dans laquelle il lui recommandait vivement de s’entretenir avec Varlin, Malon lui décrivait comment ils avaient demandé, les uns et les autres, à de grands journaux parisiens de les choisir comme correspondants, et de leur payer les frais du voyage, afin d’obtenir plus facilement les délégations des sociétés. Mais « leur petit projet avait en partie échoué ». — « Je crois, concluait Malon, que somme toute la majorité des délégués de Paris sera collectiviste ».

Les collectivistes, en effet, l’emportèrent dans les syndicats parisiens ; et, ils l’emportèrent également, quelques jours plus tard, au Congrès même, où ils infligèrent aux Proudhoniens une défaite décisive.

Nous ne pouvons ici que rappeler brièvement les résolutions du Congrès. Elles sont d’ailleurs célèbres.

Tout d’abord, malgré les instances du vieux Rittinghausen, il refusa de discuter la législation directe par le peuple, parce que la question n’avait pas été portée à l’ordre du jour et parce que l’Internationale maintenait sa résolution de ne « participer à aucun mouvement politique qui n’aurait pas pour but immédiat et direct l’émancipation des travailleurs ». La législation directe ne tendait-elle donc pas à ce but ? Certains le croyaient comme Liebknecht ; mais la majorité du Congrès, confiante en la croissance rapide de l’Internationale, État dans les États, pensait avec Hins, le délégué belge, que l’heure était proche où son gouvernement ne tarderait pas à se substituer