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Le zèle féroce du général Donnadieu ne demandait qu’un aliment ; il allait s’exercer avec une foudroyante rapidité. La cour prévôtale se réunit : deux têtes tombent presque en même temps sous l’arrêt et sous le couperet. Le gouvernement est prévenu. Quels reproches ne va-t-il pas encourir s’il se montre faible ou simplement humain ! Une politique hardie eût montré dans ces révoltes, qui cherchaient à s’exprimer par le fer et par le feu, le désespoir d’un peuple exaspéré par un parlement rétrograde. L’âme débile de M. Decazes ne put s’élever à cette grande tâche. Il préféra sévir, et il frappa plus rudement encore pour racheter l’apparent libéralisme qu’il avait montré. Il fait mettre en état de siège le département de l’Isère ; la cour prévôtale s’efface et le conseil de guerre lui est substitué, la justice demeurant la même à travers la diversité des juridictions.

Le conseil se réunit sous la présidence de M. de Vautié ; il avait capturé les vaincus, il allait les juger. Vingt et un condamnés se présentent. Trois avocats se lèvent devant eux, couverts d’invectives et de sarcasmes par le président qui affectait de manifester son opinion. Si ces pauvres êtres étaient coupables au regard de la loi, il y avait des degrés entre eux, et une justice, même implacable, aurait varié ses verdicts. Vingt et une condamnations à mort sont prononcées ; cependant huit condamnés sont recommandés à la clémence royale. Quant aux treize autres, on les va quérir à la prison ; comme ils passent le seuil de la geôle, le tocsin retentit du glas funèbre de leurs propres funérailles, et ce triste bruit n’est étouffé que par les détonations des armes qui foudroient les vaincus agenouillés.

Cependant l’émotion est extrême, et aussi la colère. Le général Donnadieu lui-même, ivre de sang, mais rassasié, intervient avec le préfet auprès du pouvoir pour lui signaler l’état des esprits et que, peut-être, la grâce sera plus efficace. Sur ces entrefaites, le recours du conseil est arrivé : les ministres délibèrent. M. Lainé veut la grâce au nom de la justice ; M. Decazes la repousse au nom de la politique et, sans attendre la dépêche ministérielle, ordonne les supplices.

Une fois encore le tocsin sonne, la prison s’ouvre ; huit condamnés s’agenouillent et tombent. Épouvantable holocauste ! Parmi eux, il en était deux pour lesquels la preuve de l’innocence avait été fournie par un alibi sérieux, après la rapide comédie de justice, et que le général Donnadieu savait innocents, et aussi M. de Vautié, dont les soldats tenaient les armes.

Un silence funèbre régnait, lourd et sinistre, sur cette ville si cruellement frappée. Didier cependant avait fui. Sa tête est mise à prix. Avec deux compagnons, errants, fugitifs, ployés sous le destin, il allait vers la frontière de Savoie. Un aubergiste piémontais livre Didier, mais quand il revient de sa honteuse démarche, Didier, prévenu par la femme, a quitté l’auberge. Il est recueilli par de pauvres gens à qui il se confie : il accepte tout, pourvu