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était non seulement inutile puisqu’il n’était pas rigoureusement appliqué, mais nuisible puisqu’il entravait l’approvisionnement, que le seul remède à la situation était l’entière liberté du commerce, à l’exception de l’exportation et de l’accaparement ; il y aurait peut-être, croyait-elle, cherté les premiers jours, mais la concurrence ne tarderait pas à ramener la baisse et les prix ordinaires. Libre disposition des marchandises, leur accaparement excepté, pensait-on ; le rapport de police cité plus haut montre comment les spéculateurs entendaient déférer sur le dernier point au vœu de l’opinion ; ils laissaient

(D’après une estampe de la Bibliothèque Nationale.)


dire, décidés à agir à leur guise, ne demandant qu’à voir atténuer les risques de contrainte. L’agiotage, qui allait grandissant, n’était pas une nouveauté ; il existait déjà, mais plus restreint comme personnel et comme opérations. Le gouvernement révolutionnaire, tout en ayant très sincèrement cherché à le faire disparaître, l’avait, au contraire, sans le vouloir, en quelque sorte démocratisé.

Les comités révolutionnaires répandus sur toute la surface du pays et qui eurent le mérite de déjouer les complots royalistes, étaient en masse composés de braves gens ; mais beaucoup ne sachant pas lire, se trouvaient obligés de s’en remettre à quelque ancien homme d’affaires ou d’église, à quelque employé ou marchand, qui les dirigea parfois, trop souvent, au gré de ses intérêts particuliers, n’ayant, pour éviter les décisions gênantes, qu’à invo-