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merce pour les transformer en corsaires. Le 18 floréal (7 mai 1798), une petite expédition partait de la Hougue, afin de reconquérir, à l’aide de bateaux plats adoptés par le Directoire en germinal an IV (fin mars 1796) et à peu près conformes à ceux qu’avait inventés le vice-amiral suédois Chapman, les îlots Saint-Marcouf près du littoral normand : pour effectuer le débarquement et enlever les îles, il ne manqua ce jour-là à certains de ces bateaux que d’être mieux soutenus par les autres (Desbrière, Projets et tentatives de débarquement aux Îles Britanniques, t. 1er, p. 72 note et 341). Le 30 floréal {19 mai), 2,000 Anglais environ débarquèrent près d’Ostende ; mais, le lendemain, à la suite d’un combat où ils perdirent 200 hommes, ils durent se rendre.

La loi du 26 ventôse an IV (16 mars 1796), relative à l’échange des Français prisonniers en Angleterre, avait abrogé celle du 25 mai 1793 qui, en vertu du principe de l’égalité des hommes, prescrivait l’échange homme pour homme, grade contre grade, et elle en était revenue à la pratique ancienne de l’échange d’un officier contre plusieurs hommes.

La République batave était, au début, une fédération de provinces autonomes ; mais, à côté des partisans de ce régime et de ceux, les orangistes, qui regrettaient le stathouder, il y avait un parti tendant à l’unité. Soutenu par le gouvernement français, ce parti finit par obtenir la convocation d’une Convention investie du pouvoir d’organiser la République. Cette assemblée tint sa première séance à la Haye le 1er mars 1796 et vit, au bout de 17 mois, le 8 août 1797, son projet repoussé par le peuple. Une nouvelle assemblée nationale se réunit le 1er septembre suivant et, après un coup d’État qui la débarrassa de la plupart des opposants, prononça, le 22 janvier 1798, l’abolition des souverainetés provinciales. Une constitution unitaire, copiée sur la constitution française de l’an III, était achevée le 17 mars et approuvée par le peuple le 23 avril. L’assemblée batave poussa l’imitation de la Convention française jusqu’à décider que ses membres seraient répartis entre les deux Chambres du nouveau Corps législatif et que le peuple n’aurait à élire qu’un tiers de celui-ci. Les hommes qui s’assuraient le pouvoir par cette usurpation appelèrent aux diverses fonctions leurs créatures, notamment les catholiques qui en étaient exclus depuis longtemps et dont le fanatisme indisposa l’opinion. Aussi, la nation applaudit-elle lorsque, le 12 juin, le général Daendels, par un coup d’État militaire opéré avec la complicité du Directoire français, renversa ce gouvernement, et nomma-t-elle un Corps législatif qui, installé le 31 juillet 1798, ratifia ce qui venait de se passer. La Constitution put, après cet accroc, fonctionner régulièrement. Un traité avait été conclu à la Haye, le 23 germinal an VI (12 avril 1798), entre la République batave et la République française, par lequel la première s’engageait à payer tous les frais d’entretien en Hollande de 25,000 soldats français.