Page:Jaurès - Histoire socialiste, V.djvu/288

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En germinal an III (mars 1795), avait eu lieu à Rambouillet la première vente publique ; en l’an IV (1796), le prix moyen fut 64 francs par bélier et 52 francs par brebis ; en prairial an V (mai 1797), 193 bêtes étaient vendues au prix moyen de 71 francs par bélier et de 107 francs par brebis. Le troupeau restait composé à ce moment de 546 animaux et on estimait à 4 000 ou 5 000 le nombre de ceux de race pure mérinos existant en France chez divers cultivateurs (Décade philosophique, 10 thermidor an V-28 juillet 1797, t. XIV). À la vente de l’an VII (1799), qui « a peu différé des prix de l’année précédente », le bélier alla de 50 francs à 105 et la brebis de 60 à 110, alors que, pour les espèces indigènes, il était rare que le prix par tête dépassât 20 francs (Annales de l’agriculture, L. V, p. 338).

Une loi du 2 germinal an III (22 mars 1795) avait décidé l’établissement de sept dépôts d’étalons ; en l’an VI (1798), il n’existait encore que deux véritables haras avec étalons et juments, celui de Rosières, près de Nancy, et celui de Pompadour dans la Corrèze, et quatre dépôts d’étalons, au Pin (Orne), à Bayeux, à Versailles et à Angers (Annales de l’agriculture, t. Ier, p. 40). Un projet de réorganisation des haras fut présenté, le 28 fructidor an VI (14 septembre 1798), aux Cinq-Cents par Eschasseriaux jeune.

Par un arrêté du 27 messidor an V (15 juillet 1797), était prescrite l’exécution de mesures destinées à prévenir la contagion des maladies épizootiques ; on ordonnait notamment la déclaration des cas de maladie et la désinfection des étables. Enfin, la loi du 19 vendémiaire an VI (10 octobre 1797), en déterminant le mode de distribution des secours et indemnités à accorder à raison des pertes occasionnées par la guerre et autres accidents imprévus, tels que grêle, incendie, inondations, épizooties — fonds provenant d’une loi du 10 prairial an V (29 mai 1797), et partie des centimes additionnels de la contribution foncière qu’une loi du 9 germinal an V (29 mars 1797) avait affectée à cet usage — fut le point de départ d’un nouveau système d’assistance.

Pour l’agriculture comme pour les divers sujets traités dans ce chapitre, j’ai, en poursuivant ce travail, acquis la conviction qui deviendra, je le crois, celle de tout lecteur impartial, que la période de 1794 à 1800 fut, à tous les points de vue, une période d’élaboration, réagissant souvent contre les principes de la Révolution, mais ayant, en fin de compte, contribué dans une très large mesure à l’organisation de la société capitaliste et préparé tout ce dont on fait habituellement honneur à Bonaparte. À celui-ci, la période de 1789 à 1799 laissait « le plus magnifique ensemble de documents qui aient jamais été à la disposition d’un législateur » (Émile Acollas, Manuel de droit civil, t. Ier. p. xxxvii, note) ; il devait uniquement, en utilisant ces matériaux, les dénaturer et aggraver encore l’œuvre commencée de réaction contre les idées de la grande période révolutionnaire.