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20 frimaire an IV-11 décembre 1795 (t. VII) disait que ce qui l’avait fait disparaître, « ce n’est ni le partage, ni le défrichement des communaux, c’est uniquement le mauvais usage qu’on a fait des portions défrichées. On s’est empressé de les cultiver en blé ». Grêle et mal conformé dans le Nord, le bétail était, dans le Midi, d’une taille et d’une forme supérieures ; le plus beau était celui de l’Agenois et du Bordelais (de Pradt, t. Ier, p. 152).

En revanche, les chevaux étaient meilleurs dans le Nord que dans le Midi. Malgré les pertes importantes subies par suite, au début de la Révolution, des ventes aux Anglais et de l’émigration des nobles, bêtes et cavaliers, et, plus tard, des réquisitions militaires imposées par la guerre, la Normandie restait la partie de la France la plus recommandable pour l’élève du cheval de luxe et de guerre (Dictionnaire universel de commerce, de Buisson, t. Ier, p. 422). Venaient ensuite, pour le cheval de trait, la Bretagne, le Bourbonnais et la Franche-Comté (Idem, p. 423-426). Mais, dans notre période, beaucoup de chevaux dits normands sortaient d’Allemagne et les bourbonnais de Belgique (de Pradt, t. Ier, p.l54 et l55). Les meilleurs chevaux de selle provenaient du Limousin (Dictionnaire cité plus haut, id., p. 424) ; presque tous étaient le produit d’un croisement avec les chevaux anglais. Le Poitou, élevant surtout le mulet, avait été très atteint par la guerre qui lui avait fait perdre ses débouchés d’Espagne et des colonies. Le Sud-Ouest possédait une race à laquelle sa vigueur, sa souplesse et sa vivacité avaient valu une réputation méritée ; excellente pour la cavalerie légère, mais négligée par le gouvernement, elle était tombée dans un état de dégénération presque totale. Dans les vallées des Pyrénées, on s’était mis à spéculer sur la production des mulets, inférieurs à ceux du Poitou, pour les vendre aux Espagnols (Ibid., p. 423-424).

Le mouton, grand au Nord (de Pradt, t. Ier, p. 152), était de petite espèce au Midi et à l’Est ; le mouton du Berri qui, pour la laine, était le premier de France, en était peut-être le dernier pour la taille (Ibid., p. 153). Rougier-Labergerie, membre du Conseil d’agriculture, comptait, en 1796, pour le territoire de la France actuelle, 24 millions de bêtes à laine (Décade philosophique du 10 messidor an V-28 juin 1797, t. XIV).

Sur les habitations rurales, nous avons le témoignage de Penières qui, dans le discours à la Convention cité plus haut, disait : « En parcourant les campagnes de quelques régions de la République, on y voit les habitations des citoyens si mal bâties, si mal distribuées, si peu aérées et si malpropres que le passant croit apercevoir la plus profonde misère, là où n’existent réellement que le mauvais goût et la pénurie d’ouvriers exercés et instruits de leur métier. Les moulins, les pressoirs, les étables, les granges et autres usines se ressentent nécessairement de l’ignorance des constructeurs qui souvent savent à peine se servir du niveau et de l’à plomb. Dans quelques pays on trouve quelquefois sous ie même chaume, et sans aucune séparation,