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rien pour les autres, a toujours été la régle des modérés. Cependant, l’avant-veille (12 octobre), si la Convention avait rapporté la disposition du 5 prairial an III (24 mai 1795) ordonnant (chap. vii) la mise en jugement de Barère, Billaud-Varenne et Collot d’Herbois, — le nom de Vadier fut omis, comme on le constatera au Conseil des Cinq-Cents, le 16 brumaire an V (6 novembre 1796) _ ce n’avait été que pour remettre en vigueur celui du 12 germinal (1er avril) qui les condamnait à la déportation.

Le 23 (15 octobre), l’arrestation de l’agent royaliste Lemaître était annoncée et il était voté qu’il serait traduit devant une commission militaire. Le 24 (16 octobre), décret d’arrestation contre deux Conventionnels, Rovère et Baladin, à juste raison suspects de royalisme, et, le 30 (22 octobre), contre Aubry et Lomont. Ce même jour, après un rapport de Barras sur la journée du 13, l’assemblée nommait une commission de cinq membres, parmi lesquels Tallien, « chargés de présenter des mesures de salut public ». La veille (21 octobre), à la suite d’un rapport tardif de Chénier sur les assassinats du Midi, était décrétée la destitution des maires et procureurs, juges et accusateurs, qui n’avaient pas dénoncé et poursuivi les « auteurs et complices des assassinats commis par les compagnies de Jésus, les compagnies du Soleil et autres associations royalistes ».

Les républicains avancés étaient d’avis de casser les dernières élections faussées en très grand nombre par les manœuvres des royalistes, et le bruit courut que, sur l’initiative de Tallien, la commission des Cinq allait proposer cette mesure. L’intervention de ce misérable redevenu républicain pour détourner de lui des soupçons justifiés, donnait beau jeu au modéré Thibaudeau qui, le 1er brumaire (23 octobre), l’attaquait, disant à ses collègues : « S’il y a eu une réaction après le 9 thermidor, n’est-ce pas Tallien qui l’a créée et exécutée ? » et on ne parla plus de casser les élections.

Le 3 brumaire (25 octobre), une loi, par ses six premiers articles, exclut, jusqu’à la paix générale, de toute fonction publique, les émigrés et leurs parents, sauf quelques exceptions déterminées, et ceux qui, dans les dernières assemblées primaires ou électorales, avaient participé à des motions séditieuses. Par les articles suivants, était ordonnée l’exécution immédiate des lois de 1792 et de 1793 contre les prêtres sujets à la déportation ou à la réclusion ; à condition de n’y jamais rentrer, « tous ceux qui ne voudraient pas vivre sous les lois de la République », étaient autorisés à quitter dans les trois mois le territoire français. Enfin, le 4 brumaire an IV (26 octobre 1795), après avoir décrété que, « à dater du jour de la publication de la paix générale, la peine de mort sera abolie dans toute la République française », que la place de la Révolution s’appellerait « place de la Concorde » et la rue qui est la rue Royale actuelle « rue de la Révolution », qu’il y aurait amnistie pour tous les faits relatifs à la Révolution, sauf pour les événements de vendémiaire et exception faite des prêtres déportés ou sujets à la déportation, des fabricateurs de