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cilité (Précis historique de la Révolution française ; la Convention, t. II, p. 480). Aussi, ne jugea-t-on guère que des contumaces que, toujours d’après Lacretelle (Dix années d’épreuves, p. 271), « on ne recherchait nullement » ; il n’y eut que deux exécutions, celle de Lafond de Soulé, un des chefs du mouvement, le 21 vendémiaire (13 octobre), et celle de Lebois, président de la section du Théâtre-Français (quartier de l’Odéon), le 23 (15 octobre). Menou fut acquitté. Après Prairial, les troupes régulières auxquelles on avait eu recours, avaient été renvoyées hors de Paris ; après Vendémiaire, elles furent installées dans la ville : le militarisme entrait en pleine croissance. Bonaparte fut, le 16 vendémiaire (8 octobre), rétabli dans l’arme de l’artillerie et nommé commandant en second de l’armée de l’intérieur ; le 24 (16 octobre), il était promu général de division et, le 4 brumaire (26 octobre), lors de la démission de Barras, général en chef de l’armée de l’intérieur. Quant aux patriotes, dès qu’on n’eut plus besoin d’eux, on chercha par un moyen détourné à s’en débarrasser. Le 15 vendémiaire (7 octobre), on supprima la distribution de vivres qui leur était faite depuis le 12 (4 octobre) ; on la rétablit pour une journée le lendemain, sans doute à la suite de réclamations, mais on invita ces citoyens « à rentrer dans leurs foyers, en se tenant prêts à marcher au premier signal » (Zivy, Le 13 vendémiaire an IV, p. 103). Un décret du 27 vendémiaire (19 octobre) accorda, il est vrai, des pensions et des indemnités aux familles des morts et aux blessés.

Il est certain que la bourgeoisie parisienne, en vendémiaire, se laissa duper par les royalistes. Si ceux-ci la poussèrent avec tant d’insistance à se soulever, c’est qu’ils voulaient à tout prix s’emparer du pouvoir que les décrets de fructidor leur avaient rendu difficile de prendre à peu près légalement lorsqu’ils croyaient le tenir. Ils y avaient d’autant plus d’intérêt qu’au même moment la troisième armée équipée par l’Angleterre était transportée sur les côtes de France.

Après l’attaque du poste des Essarts (7 messidor-25 juin) et son manifeste (chap. viii), Charette était resté tranquille, attendant, avant de bouger, une victoire des Anglo-Émigrés débarqués le 9 (27 juin) et les moyens d’action dont il avait besoin. Au lieu de la victoire, ce fut la défaite ; mais il put se consoler, le 23 juillet, par la visite d’un envoyé du ministère anglais à qui il demanda des munitions (Chassin, Les Pacifications de l’Ouest, t. Ier, p. 543-545) ; avant cette demande, il en avait été expédié qui furent effectivement débarquées et livrées, avec armes et vêtements (Idem, t. II, p. 7), le 10 août, près de Saint-Gilles-sur-Vie (Vendée). Quelques jours après, il recevait une lettre de Louis XVIII, datée du 8 juillet 1795, lui disant : « Je vous nomme général de mon armée catholique et royale » (Savary, Guerre des Vendéens et des Chouans, t. V, p. 191). Un peu avant le 10 juillet, on lui avait remis « deux dépêches du premier ministre Pitt, datées du mois d’avril, » qui l’assurait de sa sympathie (Bittard des Portes, Charette et la guerre de Vendée,