Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/85

Cette page a été validée par deux contributeurs.

s’arrête et se perd. J’admire ceux qui croient que l’on peut mener à bien des lois d’affaires en supprimant les grands courants politiques, c’est-à-dire les grands courants de pensée et de sentiment dans le pays. Autant dire au moulin de moudre le grain de chaque jour en supprimant les courants atmosphériques et en arrêtant les rivières. La Chambre ne pourra donc toucher à une seule loi intéressant les travailleurs, si modeste soit-elle, sans soulever le problème social tout entier, et quand il sera nettement posé, il faudra bien le résoudre.

Enfin, le patriotisme même donnera l’élan à l’œuvre de justice. Tous les Français ambitionnent pour la France un grand rôle dans le monde. Ce n’est point par des aventures guerrières qu’elle le trouvera, c’est en donnant aux peuples l’exemple et le signal de la justice. Si elle se met à la tête du mouvement social, si elle rallie pour le règlement international des heures de travail dans l’industrie mécanique les esprits généreux de toutes les nations ; si, en 1892, en même temps qu’elle réglera, pour protéger le travail national, les conditions nouvelles des échanges, elle propose aux peuples de régler de concert les conditions générales du travail, si elle se fait ainsi, pour son propre bien, comme pour le bien des nations, l’initiatrice et l’éducatrice de la justice, elle reprendra bientôt dans le