Page:Jaurès - Action socialiste I.djvu/80

Cette page a été validée par deux contributeurs.

la liberté, pour guérir tous ces maux, se fasse fraternelle. Il est impossible qu’un pareil idéal ne parle pas bientôt à ceux qui marchent déjà dans la vie ; il est impossible surtout qu’il ne parle pas au cœur de la jeunesse qui va y entrer.

Que feront dans la vie tous ces jeunes gens, qui se pressent maintenant dans nos écoles de médecine et de droit, dans nos facultés des lettres et des sciences ? Marcheront-ils sans idéal et sans lumière, et quel autre idéal prochain pourront-ils avoir que la justice entre les hommes ? Iront-ils, comme plusieurs que je connais, dégoûtés par les misères de l’intrigue politique, par le matérialisme grossier de certaine science et le naturalisme de certaines œuvres, renouveler en eux-mêmes, aux sources évangéliques, le sentiment chrétien et les joies chrétiennes ? Mais cela seul a une vie intérieure dans les âmes, qui a, en même temps, une vie extérieure dans les sociétés, et l’esprit chrétien ne pourra s’affirmer à nouveau, même dans l’intimité des consciences, que s’il s’applique, au dehors, à pénétrer de douceur fraternelle l’ordre social.

La jeunesse mettra-t-elle son ambition et sa vie à conquérir et à développer la science ? Noble ambition ; mais qu’est-ce que la science ? Une puissance et une joie ; et, si elle ne s’anime pas de l’esprit de justice, si elle ne se mêle pas partout à la vie des hommes, et à la