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point, entre leurs paysans et eux, communication d’intelligence et de vie, mais le seigneur était amené, par le goût même qu’il avait pour ses domaines et par la vivacité de son esprit, à s’occuper un peu des menues affaires, des petits intérêts domestiques de ceux qui travaillaient pour lui.

C’est donc, je le crois, une certaine supériorité d’intelligence, de culture aristocratique et d’activité locale qui a maintenu dans cette partie de l’Ouest l’influence territoriale de la noblesse.

Cette influence est très grande aujourd’hui. Quand les dames de la bourgeoisie vont faire une emplette dans un magasin, la marchande leur dit : « Prenez donc ceci ; madame une telle, qui est noble, l’a trouvé très bien. » Seulement, ce régime de protection et de clientèle est tellement en contradiction avec l’état de choses et l’état de pensée sorti de la Révolution française, qu’il ne peut se maintenir sans une continuelle tyrannie. Cette tyrannie a beau être voilée pour les paysans par quelques attentions, par quelques menus services, elle les irrite et les indispose sourdement. Ils ne peuvent pas user librement de leur bulletin de vote ; ils sentent, dans le choix des maîtres de leurs écoles, dans la direction même de l’enseignement, un calcul systématique ; ils ne peuvent pas toujours choisir pour leurs enfants la carrière qu’ils voudraient.

L’école normale d’instituteurs d’Angers se recrute